Un éleveur laitier dans le Calvados, a été condamné en 2016, suite à la plainte d’un voisin « néo rural », pour bruit, odeur et mouches. En ville, il est vrai, qu’on voit de moins en moins de mouches alors qu’à la campagne, l’été, difficile d’y échapper. Si vous êtes à proximité d’un élevage de chevaux ou de bovins, il faudra bien cohabiter avec elles.
La mouche est présente dans le monde entier depuis 250 millions d’années. En fait, il faudrait parler des mouches car on connaît 150 000 espèces (le nombre d’espèces pourraient atteindre 5 millions), toutes sont des diptères, des insectes à 2 ailes. En plus des mouches, l’ordre des diptères comprend les moustiques, les moucherons et autres mouchettes aux noms vernaculaires. La part des diptères dans la biodervisité est énorme et méconnue mais fascine notamment les scientifiques. Comment un animal avec si peu de neurones peut-il voler avec une telle vitesse et une telle agilité ? De quoi faire pâlir les bioroboticiens. En dehors des aptitudes pour la voltige, tous les diptères possèdent une trompe pour aspirer nectar, matières en décomposition ou sang. Dans ce dernier cas, la trombe est rigide et piquante.
L’animal est mal connu et sa réputation n’est pas des plus favorables d’autant plus qu’une mouche peut en cacher une autre. La descendance d’une mouche est phénoménale car selon les espèces, les mouches pondent de 1 à 150 oeufs. En fonction des saisons, certaines régions du globe sont réellement envahis par les mouches. La mouche peut faire trembler un continent. Ce fut le cas en 1988, quand la Lucilie bouchère ou « mouche dévoreuse d’hommes » fut découverte à Tripoli. Deux ans plus tard, elle occupait 40 000 km2 menaçant de s’étendre sur tout le continent africain. Véritable fléau pour le bétail, des mesures radicales furent prises pour stopper son invasion et on lâcha en Libye, entre 1990 et 1991, 1 milliard 300 millions de mouches mâles stériles. En 1992, l’éradication de la lucilie bouchère en Lybie fut annoncée.
Et pourtant, la majorité des diptères jouent un rôle majeur dans les écosystèmes. Les diptères ont un rôle central dans la décomposition des matières animales ou végétales. Ce rôle d’éboueur naturel est fondamental mais si l’écosystème est trop perturbé par l’activité humaine alors le nombre considérable de diptères peut poser problème.
On ne connait bien souvent de la mouche que le stade adulte mais le cycle de développement d’une mouche est plus complexe. De l’oeuf éclôt une larve (communément appelé asticot) qui se nourrit activement pour devenir une nymphe. Puis de la nymphe, s’opèrera la métamorphose vers la mouche adulte qui relancera le cycle.
Les photos ci-dessous prises lors d’un mois de juillet, sous une forte chaleur, témoignent de la présence de mouches sur un troupeau de vaches. Les vaches mais aussi les chevaux attirent des cohortes de différentes espèces de mouches. Chez les bovins, la plus emblématique est la mouche des cornes (Haematobia irritans). La mouche des cornes passe sa vie sur un bovin, à sucer son sang, à raison de 24 à 38 fois par jour. les femelles quittent l’animal hôte uniquement pour pondre sur les bouses de vaches encore chaudes. Une mouche adulte, dans sa courte vie d’une dizaine de jours, peut pondre jusqu'à 200 oeufs. La gène occasionnée sur les bovins est manifeste.
Les actions pour limiter la profusion des mouches de bétail sont difficile à mettre en place. D’autant plus quand l’activité humaine déséquilibre l’écosystème ou détruit les prédateurs naturels de la mouche (araignées, insectes, grenouilles, lézards, oiseaux… ). Parmi les expériences, on peut noter un système qui profite de la réticence des mouches des cornes à entrer dans un bâtiment sombre, des étiquettes d’oreilles imprégnées d’insecticides biologiques ou l’utilisation d’essences naturelles (basilic, géranium citronné…).
Le site internet vegactu révélait récemment une étude américaine qui annonçait que les insectes ont une conscience. Peter Singer n’exclut pas de lancer une campagne pour les droits des insectes mais estime que ce n’est pas la priorité. Spécistes et anti-spécistes auront donc l’occasion de débattre dans le futur sur le statut des mouches.
Sources :
Mouches, de Jean-Paul Haenni Muséum d'histoire naturelle Neufchatel